Après 5 ans d’attente, j’ai enfin atteint mon but : être finisher de la CCC. Cela s’est plutôt bien passé puisque j’ai bouclé le parcours de 100 km en 22h58’08 (910ème sur 1.578 finishers et 2.132 inscrits, 91ème de ma vénérable catégorie d’âge) alors que je pensais mettre une heure de plus dans mes rêves les plus fous. J’exulte donc … enfin presque.
Rappelons que le vainqueur a couru en 10h28′ et la première femme en 12h10′. Deux fois plus rapide que moi, j’ai du mal à imaginer comment cela est possible. Pour être plus positif, il y a plus de 25% d’abandons, je ne suis donc pas si mauvais que ça. 🙂 Vous pouvez trouver plein d’informations et statistiques intéressantes sur le site Livetrail.
L’avant-course
Nous sommes partis en vacances 3 semaines avant la course : 2 semaines en Suisse et 1 semaine à Chamonix même où nous sommes arrivés le samedi précédent la course (qui démarrait le vendredi).
J’ai peu couru durant ces 3 semaines : seulement 6 sorties pour un total de 53 km et 1.500 m D+. J’ai préféré m’économiser (notamment pour soigner mes tendons) et ne pas faire l’erreur de me sur-entraîner les derniers jours pour essayer de récupérer le temps perdu. Perdu pour perdu, j’ai privilégié la fraicheur. J’ai par contre beaucoup randonné en montagne, tout d’abord dans les Alpes Suisses (Grindenwald au pied de l’Eiger et Zermatt au pied du Matterhorn) puis à Chamonix. J’espère faire un compte-rendu de ces 3 semaines dans la partie « Voyages » de ce blog que j’ai fort peu utilisée jusqu’à présent.
Nous avions loué par AirBnB un superbe appartement avec vue sur le Mont-Blanc :Il était parfaitement situé, au calme, parfaitement équipé et à 5 mn du centre-ville. Je veux bien courir comme un c… pendant 24h mais je tiens à mon confort. 🙂 Le propriétaire a lui aussi couru la CCC il y a quelques années et m’a gentiment proposé de répondre à toutes mes questions mais j’ai préféré le laisser tranquille.
Dès notre arrivée en venant de la Suisse, nous comprenons pourquoi Chamonix est qualifiée de « capitale mondiale du trail » : des panneaux UTMB partout dans la vallée, toutes les marques liées au trail ont une boutique dans la ville et des trailers du monde entier arpentent les rues de Chamonix avec les équipements derniers cris. Selon mon sondage, Salomon et La Sportiva se taillent la part du lion au niveau des chaussures.
Le lundi, je passe devant l’arche d’arrivée que j’espère franchir en finisher le samedi matin suivant :
Je me rends rapidement compte que j’ai fait une erreur énorme : je n’ai pas pris de maillot finisher d’une autre de mes courses (enfin de l’UTPMA, la seule crédible) ! Beaucoup de trailers défilent (au sens défilé de mode) dans les rues avec leur maillot de finisher d’une précédente course, sans doute pour bien montrer à quel point ils sont des trailers expérimentés. Je commence à ressentir le côté « m’as-tu vu » de l’UTMB qui m’a un peu déplu.
Je rencontre au passage la seule célébrité que je reconnaitrai pendant le séjour : Sébastien Chaigneau, en tenue de trail avec un petit garçon (son fils sans doute). Lui, il ne me reconnait pas 🙂
Mercredi soir à 18h je vais récupérer mon dossard au centre sportif Richard Bozon. Pour les futurs participants, rassurez-vous, tout est parfaitement organisé : vous recevez la veille du retrait du dossard un SMS et un mail vous informant avec quel kit vous devez vous présenter : kit « normal » seul ou kit « normal + canicule » ou « normal + grand froid ». J’ai eu de la chance, j’étais dans une année clémente et je n’ai eu besoin que du kit « normal ».
La remise du dossard est l’occasion de découvrir une des attractions principales des courses de l’UTMB : le petit train. Les coureurs (les accompagnateurs ne sont en principe pas autorisés à l’intérieur) avancent en file indienne au travers des différents postes :
- contrôle de la pièce d’identité,
- vidage du sac dans un bac type « contrôle sécurité à l’aéroport »,
- contrôle de la veste imperméable qui doit être présentée ouverte,
- contrôle aléatoire de certains éléments du sac :
- signature d’un formulaire vous engageant à conserver le matériel obligatoire durant toute la course, formulaire en échange duquel vous recevez une enveloppe comprenant votre dossard, une puce à fixer au sac, un carton indiquant votre nom et votre nationalité (à fixer lui aussi au sac, au cas où un coureur ait envie de vous adresser la parole pendant la course) et des tickets accompagnateurs pour leur permettre d’accéder aux espaces autorisés lors des ravitaillements,
- fixation de la puce au sac,
- remise d’un sac en plastique de la couleur de votre course (vert pomme pour l’OCC) comprenant un tee-shirt UTMB (gris, élégant, de marque Columbia), de petits sacs poubelles à emporter sur la course, quelques paperasses et – plus important que tout – un bracelet aux couleurs de la course (j’y reviens). Pour la CCC, le sac en plastique est utilisé pour éventuellement laisser des affaires au départ de Courmayeur qui seront rapatriées à Chamonix pendant la course,
- photo avec le dossard (pas obligatoire en fait),
- pupitre pour déclarer votre adresse mail et recevoir la photo (j’ai laissé tomber).
Heureusement pour mon fils qui m’avait gentiment accompagné et a dû rester dehors, l’attente n’était pas trop longue : tout ce gymkhana est très bien organisé et ne m’a pris qu’environ 40mn (dont presque 15 mn à attendre la photo).
Dès la remise du dossard, il est très important de vous promener dans les rues de Chamonix avec votre bracelet pour bien montrer que vous êtes un coureur. Au choix vous gardez votre maillot de finisher précédemment cité ou vous enfilez le maillot gris que l’on vient de vous remettre. Soyez toutefois conscient que seul le bracelet rouge (UTMB) compte vraiment. Quant à moi, j’ai laissé mon bracelet vert au fond de mon sac. Je n’arrive pas à remettre la main dessus depuis.
Les douleurs aux tendons persistent mais sont très supportables. Les derniers jours je suis plutôt inquiété par des points de contracture en haut des mollets et j’ai peur d’attraper des crampes pendant la course. Classique d’avant-course : je suis tellement à l’écoute de mon corps que j’ai mal partout 🙂
Le jeudi soir, je passe une tête à la Belgian Party organisée par le propriétaire des magasins Trakks (Christophe). Oui, je sais, je suis Français mais un Auvergnat est prêt à tous les sacrifices pour un pot gratuit ! J’avais d’ailleurs été invité par le patron lui-même en Février quand j’avais dû annuler au dernier moment ma participation au stage avec François D’Haene. Je tenais à le remercier de vive voix de m’avoir remboursé la totalité du stage alors que rien ne l’y obligeait. C’est un trailer émérite qui vient de finir la TDS un peu plus tôt dans l’après-midi. Je papote avec 2 coureurs qui veulent boucler la CCC en moins de 22h et avec Christophe qui me donne 2 conseils précieux sur lequel je vais revenir plus tard. Il qualifie la CCC de « chouette terrain d’entraînement » et de « son format préféré ». Je gagne au passage une tombola (bon d’achat de 20 euros, lampe et buff) et, gag final, je me retrouve à tenir le drapeau belge pour la photo souvenir (ce qui fait encore beaucoup rire mon fils) :Un intermède sympathique qui me déstresse bien avant la course. Je vais au lit vers 22h00 et je passe une bonne nuit, quoique courte puisque je me lève à 4h30.
Le départ
J’ai choisi de prendre la première navette du matin, à 5h45 (pour un départ de la course à 9h00). Depuis ma prime enfance, j’ai beaucoup de mal à avaler un petit-déjeuner au saut du lit. J’ai donc préféré arriver tôt sur place et prendre mon en-cas tranquillement sans le stress du trajet.
Le point de rendez-vous des navettes est sur le grand rond-point près de la place du Mont-Blanc. Il est indiqué par un panneau mais pas de soucis, il y a du monde.
Le trajet en bus prend 35-40 mn (de mémoire) et le bus nous dépose au pied du centre sportif de Courmayeur à l’intérieur duquel vous pouvez prendre un petit-déjeuner (ne vous fiez pas à la photo, le bar se remplit très rapidement) :Sur place, je papote avec un coureur russe qui a couru le marathon du Mont-Blanc en Juin (après avoir gagné à la loterie) et espère moins souffrir sur la CCC. Vue sa tête, il a dû beaucoup souffrir sur le marathon, il me semble malade de stress. 🙂 De mon côté, je me sens plutôt zen, un peu distant.
La ressource critique sur place, ce sont les toilettes. Il y a beaucoup de cabines mises en place par l’organisation mais il y a encore plus de candidat(e)s. La proximité du départ semble tordre les boyaux de beaucoup 🙂 Préparez-vous à attendre…
A partir du centre sportif, comptez 10 à 15 mn de marche pour rejoindre le départ, avec au passage une belle vue sur notre futur terrain de jeux :Le départ se fait en 3 vagues, à 9h00, 9h15 et 9h30. Le sas de départ est défini par le numéro de dossard (3.000 à 3.999 => Sas 1, 4.000 à 4.999 => Sas 2, 5.000 et + => Sas 3) qui est attribué en fonction de la cote ITRA. Avec mon modeste 517, j’étais dans le sas n°2. Je vous suggère d’entrer tôt dans votre sas pour partir parmi les premiers. C’est important pour la suite.
Pendant l’attente, des commissaires de courses effectuent un contrôle aléatoire du contenu des sacs (j’avais tout de même l’impression qu’ils visaient les petits sacs…). Un des coureurs me semble très en difficulté : il lui manque du matériel, il tente de négocier mais avant que je ne le perde de vue, j’ai l’impression qu’il est mis hors course. Ça ne rigole pas… Bien fait pour lui en tout cas, ça lui apprendra à essayer de tricher.
Le temps passe assez vite avec quelques discours, les hymnes suisse, français et italien (les 3 dans l’indifférence quasi-générale), de la musique (kitsch, le speaker essaye de nous faire prendre tous par la main sur une chanson italienne d’amour, parce que « l’Italie, c’est l’amour »). A ma grande déception, pas de musique de Vangelis au départ (ou alors je ne l’ai pas entendue, le son était mauvais), c’est réservé aux grands de l’UTMB. Dommage que tout cela soit perturbé par de jeunes enfants à qui un adulte stupide a eu la mauvaise idée de distribuer des sifflets. Il y a du monde mais pas la grande foule. Pour résumer mon impression : un départ un peu râté, sans émotion. Petite déception. Bon, en même temps, je m’en moque un peu, je suis déjà dans ma bulle.
La course
Le premier sas démarre à 9h00 et c’est (enfin) à mon tour 17 mn plus tard. Je le dis tout de suite pour ne pas y revenir plus tard (et les photos le montrent) : la météo a été parfaite de bout en bout avec un grand ciel bleu. La chaleur du soleil dans les 2 premiers cols était atténuée par l’altitude, les sommets des trois derniers cols (passés de nuit) étaient un peu frais à cause du vent mais la chaleur revenait rapidement dans la descente. A part le coup de froid à Vallorcine, j’aurais pu courir en tee-shirt tout le parcours. De nombreux coureurs autour de moi l’ont fait.
Voici le parcours :
Courmayeur – Refuge Bertone – 14 km – 1.448 m D+
La course commence par une épingle à cheveux : descente sur une centaine de mètres avant de remonter aussi sec pour passer juste au dessus du point de départ. Les 4,5 premiers kilomètres sont assez faciles, une montée régulière sur goudron puis sur chemin sur laquelle il est possible de courir … et de doubler. Parce qu’ensuite, oubliez. Jusqu’au sommet de la Tête de la Tronche (2.561 m, déjà le point culminant de la course), c’est un sentier mono-trace assez pentu sur lequel il est quasi impossible de doubler. Voici ce que cela donne dans le bas de la montée :
et un peu plus proche du sommet :C’est pour cela que je parlais plus tôt du « petit train » comme la spécialité de l’UTMB. Je reviens alors sur le premier conseil du patron de Trakks « ne t’épuise pas à doubler, mords sur ta chique en attendant le sommet. » 100% vrai !
A ma grande surprise je suis un des rares à prendre le temps de m’arrêter pour prendre des photos. Je perds une dizaine de places à chaque fois mais le paysage est magnifique et je suis principalement venu pour cela (sur la 3ème photo, on voit Courmayeur dans la vallée) : Arrivé au sommet, la vue est fantastique : et je jette un petit regard amusé sur mes collègues de course qui profitent de leurs chaussures :La descente sur le refuge Bertone, premier ravitaillement de la journée, est assez roulante et le peloton des coureurs s’étire enfin : Pour le moment tout s’est bien passé : j’ai réussi à trottiner dans la descente mais j’ai quand même perdu une centaine de places. Je mange un peu et je remplis mes bidons avec un mix eau pure et Overstim’s.
Refuge Bertone – Refuge Bonatti – 7 km – 303 m D+
Cette partie s’annonce sur le papier comme assez facile, presque plate. Le sentier est de bonne qualité mais avec quelques raidillons et descentes abruptes. Nous croisons de nombreux randonneurs qui nous laissent passer et ne manquent pas de nous encourager. Gentils, d’autant plus que nous devons bien les embêter dans leur randonnée 🙂
Bizarrement, j’ai un énorme coup de barre à ce moment de la course. Je me traîne et je commence sérieusement à gamberger. Je n’ai couru qu’une dizaine de kilomètres. Peut-être est-ce l’effet de l’altitude ? Le sac me pèse et je m’arrête pour vider la moitié de ma poche à eau. Cela va tout de suite mieux et le moral remonte. Dommage qu’il m’ait fallu du temps pour comprendre d’où venait le problème 🙂
Arrivé au refuge Bonatti, je me rafraîchis un peu, remplis mes bidons d’eau et je repars aussitôt.
Refuge Bonatti – Arnouvaz – 5 km – 303 m
Cette partie du parcours est sans aucun doute la plus belle. Nous sommes sur un sentier en balcon assez roulant et nous courons le long de ces magnifiques paysages :
Comme vous pouvez le voir, le petit train s’est étiré mais difficile de se sentir seul :Le ravitaillement d’Arnouvaz est le plus sympathique de toute la course : tout le village semble s’être rassemblé pour nous encourager et nous ravitailler. Je discute avec un jeune du coin qui est très fier quand je lui dis qu’il vit dans une région magnifique. Il me plaint sincèrement quand je lui dit qu’il n’y a pas de montagnes à Bruxelles. Rafraîchissant 🙂
Un conseil : ravitaillez-vous bien en eau à Arnouvaz, la suite est difficile et le premier point d’eau est seulement dans la descente du Grand Col Ferret (à La Peule).
Arnouvaz – La Fouly – 14 km – 826 m D+
Nous commençons par l’ascension du Grand Col Ferret, deuxième grande difficulté du parcours (2.529 m). Une ascension un peu à l’image de la Tête de la Tronche : longue, pentue et en mode petit train avec tout de même de très belles vues : (la dame qui prend une photo était une randonneuse et pas une coureuse) Le Grand Col Ferret marque la frontière entre l’Italie et la Suisse : (là je reconnais qu’un coureur de la CCC autre que moi prend des photos :-))
La descente est particulièrement roulante, une vraie autoroute et, contrairement à mon habitude, je dépasse pas mal de concurrents.Le paysage côté suisse est moins séduisant. Je vais d’ailleurs prendre beaucoup moins de photos sur cette partie du parcours. Après cette magnifique descente, l’arrivée sur la Fouly semble interminable : nous longeons longtemps une rivière sur un chemin en descente légère. Les jambes ont du mal à trouver le rythme. Second conseil du patron de Trakks : bien boire dans la longue descente du Grand Col Ferret. Conseil suivi à la lettre, j’avais pris soin de bien me ravitailler à Arnouvaz. Comme d’habitude, petit arrêt au ravitaillement pour remplir mes bidons et manger en marchant.
La Fouly – Champex-Lac – 14 km – 577 m D+
Cette partie est sans grand intérêt, dans la lignée de l’arrivée sur la Fouly. Nous suivons longtemps une rivière avant de rentrer dans la forêt. Nous traversons deux charmants villages suisses (Praz-de-Port et Issert) mais le soleil est déjà passé derrière les crêtes et la qualité des photos s’en ressent : Je remplis mes bidons à une fontaine où des enfants sont en train de se laver les dents. Apparemment tous les chalets n’ont pas l’eau courante. 🙂 Cette partie descendante était fatigante, je souffre d’une ampoule au talon gauche et je suis content de remonter sur Champex-Lac où j’arrive un peu avant 20h00 (1 heure avant mes prévisions les plus optimistes).
Je fais une très longue pause à Champex-Lac (50 mn). J’en profite pour recharger ma montre, me changer de la tête aux pieds en m’habillant un peu plus chaudement avant la nuit. Je mange aussi. Il y a un plat chaud (riz ou pâtes) mais j’ai uniquement un petit gobelet avec moi. Me voilà contraint de manger avec les doigts…
Champex-Lac – Trient – 16 km – 1.067 m D+
Quand je repars de Champex-Lac, la nuit est tombée et voici ma dernière photo pour un long moment (c’est un lac !):A part l’ampoule au talon, je suis en pleine forme, limite euphorie. Je calcule de tête mon heure d’arrivée (vers 5h, sur la base de ma moyenne) et me demande si je dois réveiller ma femme et mon fils à l’arrivée ou rentrer directement à l’appartement. Ils ne sont pas du matin…
La montée vers La Giète est techniquement difficile : pierreuse, pentue mais je l’avale sans trop de difficultés. Dans la montée, un moment cocasse : une vache visiblement hargneuse s’échappe de son enclos devant les yeux de mon petit groupe et attaque une autre vache. Les deux commencent à se donner des coups de cornes avant de s’arrêter subitement en nous regardant fixement. Pas trop rassurés, nous faisons un détour pour les éviter.
A La Giète, nous faisons un ravitaillement en eau dans une bergerie. Sympathique même si les photos ne le montrent pas vraiment : Mon euphorie cesse rapidement dans la descente qui est UTPMAesque : des racines, des rochers, très pentue. Je peine à trottiner et je perds beaucoup de temps. Au ravitaillement de Trient je papote avec un coureur du cru qui me dit que le pire est à venir.
Trient – Vallorcine – 11 km – 837 m D+
La montée à la sortie du ravitaillement est un vrai mur (662 m de D+ en 3,3 km, un bon 20%). Je souffre et je suis obligé de m’arrêter 4/5 fois pour me reposer. Pour la première fois de la course, je me fais doubler en côte par des concurrents. La descente est elle aussi très technique et je marche beaucoup. Nous passons la frontière entre la Suisse et la France sans que je ne m’en aperçoive. Les douaniers sont couchés à cette heure-ci 🙂
Je fais un nouvel long arrêt à Vallorcine (37 mn) et j’en profite pour prendre un café bien chaud. Bêtement j’oublie de recharger ma montre, je vais le regretter plus tard. Le moral est au beau fixe : même s’il me reste une montée très difficile (la Tête aux Vents), je suis largement en dessous des barrières horaires et je sais que – sauf accident – je vais terminer.
Vallorcine – La Flégère – 11 km – 964 m D+
En sortant du ravitaillement le froid me saisit, je m’arrête aussitôt sorti de la tente pour m’habiller encore plus chaudement. La température a brutalement chuté pendant la pause et je ne suis pas le seul à être surpris. Jusqu’au Col des Montets, la route est facile, en pente douce. A partir de ce moment, le chemin monte et est techniquement très difficile avec beaucoup de cailloux et de très hautes marches. Je me mets lâchement dans le sillage d’un trailer qui avance lentement mais sûrement. Au moment où la pente s’atténue, je veux le relayer (lui et tout le petit groupe qui s’est collé à nous) mais je lâche tout le monde sur une micro-accélération. La suite est plutôt en descente, je la cours moitié en trottinant, moitié en marchant sans trop souffrir. Le soleil se lève et en arrivant vers la Flégère je peux reprendre quelques photos : Après 2-3 bips, la batterie de ma montre me lâche. Grrr…. A la Flégère, je me restaure un peu, me fait gronder par un bénévole parce que je finis une bouteille au goulot (ce qui est interdit parait-il) et j’appelle mon épouse pour l’informer de mon arrivée d’ici 1h30. Il reste 9 km.
La Flégère – Chamonix – 9 km – 6m D+ (:-))
La descente se passe mieux que je ne le pensais initialement puisque j’arrive à trottiner sur une bonne partie du parcours. Arrivé dans Chamonix je croise un des 2 coureurs avec qui j’avais parlé lors du pot Trakks. Son pote et lui ont bouclé le parcours en moins de 22h et il est heureux. Comme ma montre est éteinte, je ne sais plus trop où j’en suis. Assez loin devant moi, je vois une femme qui peine à terminer. Je commence à la rattraper. J’hésite à la dépasser (je trouve ça un peu nul de faire le forcing à la fin) mais d’un autre côté je ne voudrais pas que la même mésaventure qu’aux 20 km de Bruxelles m’arrive : louper de peu un « joli » temps. J’accélère donc et, bonne idée, boucle le parcours en moins de 23h00. Il est 8h15, il y a quelques spectateurs qui applaudissent et ma femme et mon fils à l’arrivée. Ca y est, je suis finisher ! Je récupère le célèbre gilet du finisher (très laid):
Je renonce à la bière (une Heineken, incompatible avec mon nouveau statut de Belge) et je rentre prendre un petit-déjeuner avant d’essayer, sans succès, de faire un somme. Je devrais exulter mais je reste un peu amorphe, un peu comme après un vol transatlantique.
Voici ma trace GPX (malheureusement incomplète)
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et mes temps de passage :
L’après-course
Les jours suivants, je vous le donne en mille, il était important de se promener dans les rues de Chamonix en arborant le gilet de finisher et le bracelet (le gilet ne permettant pas d’identifier au premier coup d’œil de quelle course vous êtes le finisher). Pas mon truc, vous l’aurez compris.
J’avais prévu aller au buffet de la fin UTMB mais j’ai fait demi-tour quand j’ai vu la file d’attente et découvert que ma femme et mon fils devraient payer 15 Euros chacun pour y participer.
Côté physique, j’ai eu les courbatures habituelles les 2 premiers jours mais j’ai moins souffert sur cette course que sur l’UTPMA un an plus tôt. Comment l’expliquer ? Ma préparation a été chaotique à cause de nombreuses blessures mais je suis arrivé en montagne 2 semaines avant la course. Je n’ai pas beaucoup couru mais j’ai beaucoup marché et je pense que cela m’a aidé. Autre facteur : la CCC est beaucoup plus « roulante » que l’UTPMA, surtout dans sa première moitié. Même un piètre descendeur comme réussissait à trottiner, voire courir dans les descentes. Quant à mes tendons, la douleur a quasiment disparu : j’ai moins mal après la CCC qu’avant. Bizarrement, je rêve encore souvent de la course, chaque fois avec les aventures les plus improbables. J’espère que cela va bientôt s’arrêter. 🙂
La logistique
Rien à redire, tout était parfaitement organisé. Une belle machine. Certains ravitaillements étaient un peu chaotiques, surtout pour s’alimenter en eau mais rien de grave. Ils étaient variés et copieux (j’ai découvert le bonheur de manger une pastèque) et les bénévoles sympathiques. Vraiment parfait. Un mot aussi pour les coureurs : je n’ai vu aucun déchet sur le parcours. Bravo à nous tous !
Je ne peux pas vraiment donner d’avis sur la qualité du fléchage puisqu’il y avait toujours des coureurs avec moi 🙂 Je ne pense pas avoir été seul un instant. Au pire (au mieux :-)), j’avais un coureur 50m devant moi et 50 m derrière. Je peux simplement dire que le fléchage était très visible la nuit et que pour la première fois sur un grand trail je n’ai jamais eu la moindre hésitation sur le parcours à suivre.
Le matériel
Il y a beaucoup à dire sur ce sujet qui m’a valu sueurs froides (avant) et transpiration (pendant).
Le sac à dos
Juste avant de partir en vacances, je veux préparer mon sac pour la course avec le kit normal. J’avais couru tous mes précédents trails soit avec le Salomon XT Wings 10+3 Vest de 14 l, soit avec le Salomon Skin 10 Pro Set d’un volume de 10 l (le sac avec lequel j’avais couru l’UTPMA). Patatras : aucun des deux ne pouvait contenir le kit de base, sans parler du kit grand froid si d’aventure il était demandé par l’organisation. Après avoir parlé de la CCC pendant 5 ans, me voila en train de faire les magasins de trail en urgence la veille de mon départ en vacances pour trouver son sac. 🙂 Je n’ai rien trouvé à Bruxelles et finalement je me suis arrêté dans un magasin Décathlon sur la route pour acheter un sac trail de 15 l. Je peux vous assurer que le sac de 15 l de Décathlon contient beaucoup plus que le 14 l de Salomon. Au final, le kit de base est rentré mais je ne sais toujours pas comment j’aurais pu rentrer le kit grand froid. Je ne sais non plus comment beaucoup de coureurs ont réussi à rentrer le kit de base dans des sacs beaucoup plus riquiqui que le mien. J’en ai complexé toute la course.
Je pense que ces trois éléments prenaient beaucoup trop de place (et de poids) :
- Collant de course à jambes longues
- Seconde couche chaude additionnelle : un vêtement seconde couche chaud à manches longues (coton exclu) d’un poids de 180g au minimum (homme, taille M)
- Sur-pantalon imperméable
mais je n’avais pas envie de changer tout cela pour peut-être une seule course.
La poche à eau Décathlon livrée avec le sac ne m’inspirait pas confiance au niveau du raccord du tuyau, je l’ai donc remplacée par une poche Salomon de 2 l. En plus, j’ai pris mes 2 flasques souples de 350 ml Raidlight additionnelles. J’avais donc sur moi un potentiel de 2,7 litres alors que l’organisation ne recommandait que 1 litre. Comme indiqué plus haut, j’ai arrêté de remplir totalement ma poche à eau dorsale après le premier ravitaillement, je pense avoir tourné en permanence entre 1,5 et 2 l, ce qui a été utile entre Arnouvaz et La Fouly mais exagéré le reste du temps. Le sac a fait le boulot mais il n’est pas super confortable : le haut de la poche à eau frotte le dos et les courroies qui sont censées maintenir le sac se desserrent sans cesse. Disons que j’en ai eu pour mon argent.
Côté nourriture, j’ai (comme toujours) amené beaucoup trop. Là encore, j’aurais dû écouter l’organisation et me contenter de « 2 gels et 2 barres énergétiques de 65g chacune ».
Les bâtons
C’est à mon avis un accessoire indispensable pour cette course. Mes Leki Micro Trail Pro m’ont fait une frayeur en début de course puisque je n’arrivais pas à en tenir ouvert un, le petit téton refusant de sortir. Après 2/3 coups, le téton est enfin sorti mais je n’ai pas osé les replier pendant la course. Ils étaient un peu embarrassants aux ravitaillements. A part ce léger désagrément je les adore et ils m’ont bien aidés tant en montée que dans certaines descentes moins roulantes.
Les chaussures
Très content de mes Brooks Cascadia 13. Je pense que j’ai pris une 1/2 pointure de trop. Du coup mon pied glissait un peu dans les descentes malgré le bon serrage de lacets. Je pense que ces glissements répétés sont la cause de mon ampoule au talon gauche qui m’a un peu gêné. Je pense que je vais rester sur ce modèle. Le seul reproche que je leur fait est le manque d’accroche sur les pierres humides mais comme le temps était parfaitement sec, je n’ai pas eu à en souffrir.
Bilan de la course
J’ai adoré le parcours, surtout entre le départ et le Grand Col Ferret où les paysages étaient magnifiques. La fin de course avec le lever de soleil sur l’Aiguille d’Argentière et les Drus était elle-aussi magnifique. Partout où nous sommes passés, il y avait du monde pour nous encourager, c’était très agréable.
J’ai moins aimé le côté « Grand Barnum » de cette course : à aucun moment je n’ai été seul. Je ne parle pas du compagnon (ou de la compagne) de fortune qui court et papote avec vous pendant quelques kilomètres. Je parle d’être en permanence dans un groupe de 5-10 coureurs qui avancent tête baissée, dans le silence. Je n’ai pas trouvé l’ambiance entre coureurs tip-top et les coureurs beaucoup trop sérieux, concentrés sur leur course.
Le Marathon du Médoc est lui-aussi un « Grand Barnum » mais on s’y amuse. Sur la CCC l’enjeu physique m’a donné l’impression d’hypnotiser les coureurs qui ne savaient pas lever la tête pour profiter du paysage ou prendre le temps de discuter avec les autres. Quant à l’ambiance à Chamonix, elle avait un côté « énergisant » avec toutes ces personnes en pleine condition physique et en même temps un côté « m’as-tu-vu » sur lequel je ne reviens pas.
Je suis hyper content et hyper chanceux d’avoir couru la CCC dans des conditions idéales, je suis plus que satisfait de ma performance mais cette course ne correspond pas à ma vision du trail : trop de monde, un 20 km de Bruxelles en montagne. J’ai du coup perdu toute envie de courir l’UTMB un jour, il y a plein d’autres courses plus intimes, plus sauvages en ce bas monde. Au bout du compte, j’ai préféré l’UTPMA… Peut-être n’étais-je pas en conditions psychologiques idéales pour profiter de la course ou suis-je victime d’une dépression post-partum après avoir mis 5 ans à accoucher de la CCC 🙂
Et maintenant ?
Je viens de me reposer deux semaines et je vais recommencer à trottiner ce week-end. J’ai deux objectifs d’ici la fin d’année :
- le Trail de Bruxelles (33 km) (20 Octobre) que je veux courir à fond pour voir ce que j’ai dans le ventre. Je m’étais promis de ne plus le courir mais il est pratique d’un point de vue logistique et le courir en mode « 20 km » va me forcer à me bouger à l’entrainement;
- Olne – Spa – Olne (69 km) (24 Novembre) : un trail intime, sauvage comme je les préfère et pas évident du tout (2.449 m D+). Cela fait plusieurs années que je l’ai dans le radar et j’ai encore peu couru cette année.
Mon programme 2020 est moins clair. Finie la chasse aux points UTMB. Je commence à me renseigner pour faire un des Chemins de St-Jacques-de-Compostelle en mode trail. J’y reviendrai sans doute dans les semaines à venir.